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Une
légende complexe
Dans son ouvrage, G. Grote fait un exposé complet
des développements de la légende des Amazones ; il en
rappelle tous les épisodes et les situe historiquement.
Il prend bien soin de séparer ce qui relève de la fable
originelle de ses développements ultérieurs, et il analyse
l'évolution du point de vue des historiens antiques.
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Histoire
de la Grèce de G. Grote |
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Localisation
La plupart des textes anciens indiquent qu'elles habitent
à l'embouchure du fleuve Thermodon et que leur capitale
est Thémiscyra.
Quelques textes indiquent cependant
- soit qu'elles sont originaires des bords du lac Maetis (Palus Méotis)
d'où elles ont été chassées ;
- soit que, chassées de Thémiscyra, elles sont remontées
au Nord dans une région plus proche de la Scythie.
Par ailleurs, lors de leurs expéditions, elles auraient fondé
de très nombreuses villes : Éphèse, Cymé,
Smyrne, Paphos et Sinope.
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Femmes guerrières et belliqueuses
Tous s'accordent pour faire de ces femmes des guerrières.
Les raisons proposées par les auteurs sont très diverses
:
- abandonnées par leurs maris, elles décident de se
défendre elles-mêmes
- violentées, elles fondent un royaume qui exclut les mâles.
Elles savent faire la guerre à cheval et passent leur temps
à s'entraîner. Dès lors, elles refusent d'élever
les enfants, pour se consacrer à cette seule activité
guerrière.
La légende cependant se développe pour
en faire un peuple belliqueux qui ne vivrait que pour le plaisir de
la guerre et de la conquête.
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TABLEAU
DES CONSTANTES
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Les armes
Les Amazones sont
représentées avec diverses armes
- la lance quand elles sont à cheval
- l'arc
- la hache : c'est elle que les auteurs donnent comme arme caractéristique
des Amazones. Le terme est tantôt pe/lekuj
(Arrien), tantôt sa/garij
(Strabon), tantôt la/bruj.
La hache :
labrys, la/bruj
Ce
terme viendrait du lydien ou du carien
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La hache peut être parfois à double
tranchant

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Toutefois on trouve aussi d'autres noms pour désigner
la hache des Amazones, notamment le terme
sa/garij commun à l'arme des Perses,
des Scythes et des Amazones (Bailly). C'est le terme employé
par Xénophon.
Le terme de pe/lekuj, hache à
double tranchant, d'abord réservé aux sacrifices, est
aussi utilisé pour la hache de guerre.
Le bouclier
: peltè
"Avec cette forme, la pelta appartient plus spécialement
aux Amazones et aux races asiatiques (Quint. Smyrn. I, 147-149) "
(Dictionnaire Rich)
Il s'agit d'un petit bouclier échancré en forme de croissant
: grec pe/lth .
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On aperçoit le bouclier caractéristique
aux pieds de l'Amazone blessée de Crésilas

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Une référence
"naturelle"...
De la même manière que Xénophon évoque
naturellement la "hache des Amazones", Suétone fait
référence aux armes de ce peuple guerrier :
"In praeparanda expeditione primam curam habuit deligendi uehicula
portandis scaenicis organis concubinasque, quas secum educeret, tondendi
ad uirilem modum et securibus peltisque Amazonicis instruendi."
Suétone, Vie de Néron
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Type "scythe"

"Coureuse laconienne"
Musée du Vatican

Vase de Baltimore
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Apparence
L'apparence des
Amazones est très diverse. On peut retenir cependant certains
types
- le type scythe : les Amazones portent alors un vêtement
collant qui couvre entièrement le corps. Les représentations
figurées montrent qu'elles portent un pantalon collant nommé
a>naxuri/dej. Les
taches ou les zébrures indiquent que ces vêtements sont
faits de peaux de bêtes.

Sur ce vase du Louvre, la tenue paraît composite
: plusieurs éléments scythes caractéristiques
apparaissent notamment le collant porté sous une tunique ornée.
On remarquera que les bras semblent aussi recouverts d'un habit semblable.
L'armement est bien aussi étranger. Par contre la tunique est
bien proche de celle de la coureuse laconienne, mais elle ne laisse
pas apparaître le sein...
Les coiffes
varient : tantôt bonnet phrygien, tantôt mitre, un dialème,
tanttôt un casque ou un bonnet de fourrure.
bonnet phrygien
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mitre
ou bonnet
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Diadème
(Mississipi)
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Philadelphie MS1752
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- le type "dorien" (ou dorique). les Amazones sont
alors vêtues comme des jeunes filles spartiates, avec une tunique
courte (chlamyde) rattachée sur l'épaule gauche et qui
laisse apparaître le sein droit.
Statuette représentant
une jeune spartiate
Photo MT
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Temple de Sélinonte
Photo Mac Manus
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Mausolée d'Halicarnasse
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- un type où elles ne se distinguent en rien des guerriers
grecs : elles portent l'équipement guerrier grec : on voit
cependant à leur visage (ou à leur peau blanche) que
ce sont des femmes.
Vase à figures rouges : L'Amazone
terrassée par Héraclès est vêtue comme un
soldat grec (casque, cuirasse, jambières, bouclier rond)
(photo Mac Manus)
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Moeurs particulières
Comme dans toute création d'une "utopie",
les écrivains ont brodé sur quelques éléments
fondamentaux. Le principal a trait à leur rapport à la
maternité :
- comme elles font la guerre, elle refusent de s'occuper des enfants
à la manière des femmes grecques : elles n'allaitent pas,
elles rejettent ou mettent en esclavage les enfants mâles. Chez
plusieurs auteurs, elles valorisent la virginité.
- dès lors se pose aux mythographes le problème de la
perpétuation de leur société. L'essentiel est de
refuser l'idée de "famille" qui donne la prédominance
aux hommes ; la plupart des auteurs ont développé des
légendes selon lesquelles elles s'unissent "au hasard",
ou bien les femmes sont exclues du royaume des Amazones quand elles
ne sont plus vierges...
Il semble bien que se développe alors une image de "contre-modèle"
grec : les moeurs des Amazones révèlent par un système
d'inversion, ce qu'est l'être civilisé.
Une femme grecque s'accomplit dans la maternité
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Valorisation de la virginité
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La femme s'occupe des enfants : elle les allaite
et les éduque
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L'Amazone refuse d'allaiter
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La société grecque valorise les
enfants mâles
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Les Amazones ne gardent que les filles
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La femme grecque s'occupe de son foyer
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L'Amazone fait la guerre
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Une femme honorable ne doit pas franchir le
seuil de sa maison
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L'Amazone part en expédition
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On trouvera chez tel ou tel auteur un autre détail
significatif de la manière dont les Grecs pensaient leur civilisation,
c'est à dire, à leurs yeux, la normalité. On a
souvent souligné par ailleurs que les grands héros civilisateurs
(Héraclès, et, à un moindre degré, Bellérophon
et Thésée) avaient dû affronter cette race de femmes,
et soit les renvoyer dans leur espace propre - hors de la Grèce
- , soit les détruire...
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